Vous avez dit big bang?
Comme James Peebles l’a souligné après son prix Nobel en 2019, le terme Big Bang qui connote une création de l’univers en un lieu à un temps déterminé qui, comme cela est supposé implicitement se réfèrent à notre perception d’espace et de temps dans notre univers, n’a pas de sens puisque notre univers est un espace-temps (ce qui est explicité par sa modélisation mathématique).
En effet, la relativité nous enseigne que l’espace et le temps n’ont pas de caractère physique individuel, contrairement à la conception newtonienne et commune, car il ne sont que des ombres de l’espace-temps, seul concept à avoir un sens physique.
Rappelons qu’un espace-temps n’a nul besoin d’être localisé dans le temps et dans l’espace pour être doté des concepts de temps et d’espace puisque ces concepts, tels que nous les percevons, sont les ombres de cet espace-temps, donc sont internes à notre univers!
L’univers est-il inclus dans quelque chose dont il serait issu?
A supposer que notre univers soit inclus dans une entité, doté de ces paramètres d’espace et de temps, qui le contiendrait et qui les lui confèrerait (ce que certaines théories postulent, mais cela ne fait que reporter le problème vers cette entité, d’où vient-elle, comment a-t-elle été dotée de ces paramètres ?) , le terme Big Bang, ainsi pensé , serait-il adéquat?
Cette hypothèse ne fait que reporter le problème
Espace-temps et singularité
Pour le modèle cosmologique standard, l’équation d’Einstein définit un espace-temps avec une singularité, ce qui n’est pas trivial, car il existe des variétés modélisant des espaces sans singularité (la surface d’une sphère est une variété compacte sans singularité).
Peut-on associer à cette singularité la création de l’univers?
Cela est tentant, mais sachant que cette singularité n’appartient pas à notre espace-temps (du-moins dans sa modélisation par une variété) ceci est problématique car il semble alors qu il n’y ait pas de continuité entre la singularité et l’espace-temps, qui est ce qu’on appelle un « ouvert », (mathématiquement on peut s’approcher autant qu’on veut de la singularité mais on ne peut l’atteindre).
Curieusement si on examine le les équations de chute libre radiale dans un trou noir (autre solution de la relativité générale), on atteint pourtant la singularité en un temps propre fini (Si on part d’une distance finie de la singularité).
Cependant ce point est intéressant, car bien qu’il n’y ait pas de continuité, cela ne signifie pas qu’il n’y ait pas d’influence.
Par exemple, en relativité, dans les trous noirs, toute la masse qui conditionne l’espace-temps infini associé est « dans » la singularité qui, pourtant, n’en fait pas partie, même s’il en est infiniment proche.
Finalement l’existence de singularité est, peut-être, plus une ouverture pour une réflexion sur l’existence de l’univers, à laquelle il serait intéressant d’associer cette réflexion à celle de la « censure cosmique » qui encapsule les singularités de ce type et permet une physique raisonnable sans violation de la causalité, qu’une fin de non recevoir.
L’espace-temps définit-il tous les paramètres?
Après ces digressions, pour revenir à ce que produit l’équation d’Einstein, on constate que la phénoménologie de l’univers peut être totalement définie uniquement par les propriétés géométriques internes de cet espace-temps. Ainsi l’expansion, par exemple, est une propriété interne : Les géodésiques suivies par les éléments infinitésimaux des fluides constitutifs de l’univers, toutes émergentes du voisinage de la singularité, divergent.
Le nécessaire « ajout » de la mécanique quantique
Ce modèle défini par la relativité générale reste théorique, car un univers tel que celui décrit par l’équation d’Einstein avec des fluides cosmiques serait totalement stérile et ne pourrait pas produire ce qu’on observe (galaxies, étoiles, planètes, et par conséquence de l’humain).
Dans la phase d’inflation du modèle standard cosmologique, (un ajout qu’on estime pertinent) on suppose que ce sont les fluctuations quantiques dilatées par l’expansion qui ont produit les germes qui vont donner naissance aux structures qu’on observe. Leur évolution étant alors modélisées par un processus de type « perturbatif » dans l’univers défini par l’équation d’Einstein qui sert alors « d’espace de fond ».
Une telle méthode, même si elle peut être efficace, n’est guère satisfaisante pour l’esprit, car c’est une approche hybride du problème.
Un modèle résultant d’une théorie donnant un espace-temps de fond perturbé par des éléments régis par une autre théorie indépendante, la dynamique globale résultant, au moins au premier ordre de l’espace de fond défini par la relativité générale.
En l’absence d’une théorie unifiant relativité générale et mécanique quantique, c’est pour l’instant ce qu’on peut proposer de plus efficace.
Existence de l’univers et de l’humain
L’univers résultant de l’équation d’Einstein, qui est un espace-temps , dans le contexte de la relativité générale, n’a ni création, ni passé, ni présent, ni futur et n’est pas en expansion, le seul problème à se poser est celui de son existence.
Compte tenu que nous faisons partie de cet univers, du fait de notre existence la réponse est sans ambiguïté : Il existe et le problème de sa création est finalement, peut-être, un faux problème lié à des habitudes de pensée que nous considérerions, à tort, comme absolues.